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Ashley Winston | Z | Zack Barrons | Harvey Winston |
Hell’s Kitchen, appartement d'AshleyAshley écoutait la respiration de Zane. Elle était lente et profonde. Dehors, la lumière du soleil déclinait rapidement. La jeune femme se leva lentement. Elle était sur le seuil de la salle de bain lorsque Z marmonna d’une voix endormie :
— Où est-ce que tu vas ?
— Prendre une douche, répondit-elle en souriant.
— Reviens ici, protesta-t-il mollement.
— On ne peut pas rester caché ici indéfiniment, le taquina-t-elle. Il faut que j’aille voir mon père.
Elle pénétra dans la douche et laissa la caresse de l’eau chaude la réveiller de sa torpeur. Zane arriva derrière elle, dégagea sa nuque et commença à l’embrasser tandis que son autre main s’égarait sur sa hanche :
— Je peux prendre une douche avec toi ? murmura-t-il.
Il semblait ne pas pouvoir se rassasier d’elle et ce n’était pas pour lui déplaire. La transformation suivait son cours, cela ne faisait aucun doute.
Ashley arriva au Red Moon à la nuit tombée. Elle balaya la salle d’un regard, Harvey n’était visible nulle part. Zack était derrière le bar, elle alla le saluer.
— Tu viens me narguer ? soupira-t-il.
— De quoi tu parles ?
— Je ne sais pas, dit-il à voix basse sur un ton de conspiration. De cette lueur qui pétille dans tes yeux, de ce petit air satisfait post-coïtal…
— Zack !
— Quoi ? Personne n’écoute, t’inquiète pas. Profitez-en, après la première lune, c’est plus pareil, lâcha-t-il avec nostalgie.
— Tu as été mordu, toi aussi ? demanda la jeune femme curieuse.
— Yep, par une putain de tarée solitaire… mais ça, je ne l’ai su qu’après. Elle mordait ceux qui lui tapaient dans l’œil. J’suis sûre qu’elle a dû mordre pour un sourire ou un coup d’ œil trop appuyé… Au moins, elle était à tomber et le sexe jusqu’à la première pleine lune… lança-t-il avec une expression sans équivoque sur le visage. Petite veinarde, va. J’espère que tu ne feras pas comme elle après…
— C’est à dire ?
— Elle a disparu du jour au lendemain. J’ai cru mourir pendant la métamorphose… et après, j’ai cru que j’étais devenu fou. Elle ne m’avait rien dit du tout, sur ce que j’étais devenu…
— Je suis désolée, compatit Ashley. Pas étonnant que tu aies eu du mal à trouver une meute après ça.
— Ouais, c’est du passé. Je suis bien ici maintenant.
— Tu as vu mon père ? Il ne répond pas à mes appels.
— Ils sont rentrés tout à l’heure avec Conor. Je crois que ton père est reparti chez lui.
Ashley trouva Harvey dans la pénombre du salon familial, assis dans son fauteuil, un verre de whisky à la main. Elle vint déposer un baiser sur son front et s’assit près de lui. Son regard était fixé sur une vieille photo qui ornait le buffet. Harvey et Penny tenaient Ashley dans leurs bras, elle n’avait que quelques mois. Leurs visages étaient radieux.
— Je ne l’ai jamais connue aussi heureuse que le jour où les papiers de ton adoption ont été signés, confessa-t-il d’une voix songeuse.
Ses traits étaient tirés, son teint maladif.
— P’pa ? Où étais-tu ? Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Harvey lui détailla le déroulement de la rencontre avec les représentants des autres factions, les heures passées à veiller Elowen Kelly.
— De l’aconit ? Ça veut dire que tu étais visé spécifiquement…
— Ou alors, c’est ce quelqu’un a voulu nous faire croire. D’ailleurs, le petit Wei, ton ami le privé et toi avez été désignés pour trouver qui est derrière tout ça, au nom de chacune des factions. Il faudra que je m’assure que la trêve tient toujours après le bordel du conseil...
Son regard acier retrouva son étincelle habituelle :
— Tu me tiens au courant si vous trouvez quelque chose, et tu ne prends aucun risque, ordonna-t-il. Je m’en fais déjà assez comme ça avec ta mère.
— On va la retrouver. Avec Zane, on a peut-être une piste, je…
— Zane ?
— Oui, c’est le prénom de Z, tu sais, le privé…
— Hum, ton fameux ami, la taquina-t-il.
— À propos de ça… commença Ashley qui prit une grande inspiration pour se donner du courage. Il est devenu… plus qu’un ami.
— Quelle surprise ! Ta mère n’arrêtait pas de me dire que tu étais amoureuse de ce type. Elle avait raison. Un privé, Ash ? Entre lui et Wei, tu as vraiment un don pour choisir ceux qui peuvent le plus m’emmerder. J’espérais que Conor ou même le nouveau barman finiraient pas te taper dans l’œil...
— Tu devrais te méfier de Conor, p’pa. Il a trop d’ambition.
— Tss, tu crois que je ne le vois pas ?
— Et je ne t’ai pas encore tout dit, à propos de Zane…
Harvey regarda sa fille intrigué. Il attendit qu’elle se décide à briser le silence :
— Je l’ai mordu. Il a commencé sa transformation.
Le verra éclata dans la main d’Harvey, ce qui fit sursauter Ashley. L’homme se leva brusquement et se mit à aboyer sur elle :
— Mais qu’est-ce qui t’a pris ? JE décide qui rejoint la meute ! Tu crois que c’est facile de maintenir l’équilibre et la paix entre nous ? Un mâle en plus ! Un coup à bousiller la hiérarchie parmi mes gars…
— Je suis désolée ! D’accord ? Il allait mourir… je ne pouvais pas le laisser partir…
— Merde Ash ! Tu transformes un mourant sans lui laisser son mot à dire ! C’est comme ça qu’on se retrouve avec des solitaires qui font tout et n’importe quoi ! Faut que tu arrêtes d’en faire qu’à ta tête, tu as des responsabilités qui t’attendent !
— Je ne vais pas l’abandonner à son sort, je l’aime ! Et moi, j’ai mon mot à dire sur ces fameuses responsabilités ? Tu t’es demandé ce que je voulais vraiment ? Conor m’a balancé ton petit projet… Moi, à la tête du clan ? Tu m’as bien regardée ?
— Oui, justement. C’est parce que je te connais que je sais que tu serais parfaite pour mener ce clan. Enfin, si tu t’en donnais les moyens.
— J’ai pas envie de tremper dans tes affaires, papa. Je croyais que c’était clair.
— Quand tu seras chef de meute, tu feras ce que tu veux. Je ne serai plus là pour te dire quoi que ce soit…
Ashley se radoucit aussitôt :
— Ne dit pas ça...
— C'est la réalité. Je ne serai pas toujours là, Ash. J'ai choisi de tremper dans des business lucratifs, mais dangereux, et je traîne mon lot d’ennemis. Je n'ai jamais voulu te l'imposer, et le moment venu, tu n’en feras qu’à ta tête, comme toujours. Mais ne lâche pas la meute. Un loup solitaire, c’est un loup mort.
— J’ai jamais dit que je vous lâchais, mais je ne laisserai pas tomber Zane non plus. S’il n’est pas le bienvenu, vous me verrez un peu moins. Et s’il n’est pas prêt à partager la vie d’une meute, je ne lui imposerai pas.
Harvey réalisa qu’il manquait quelque chose au cou de sa fille. C’est lui qui lui avait offert ce précieux cadeau le jour de ses vingts ans. Les pierres de Lune magiques valaient une petite fortune sur le marché et les loup-garous citadins se les arrachaient pour préserver leur anonymat dans le monde des Hommes.
— C’est lui qui a ton collier ? Qu’est-ce que tu feras à la prochaine lune ? demanda-t-il en caressant la chevalière à son petit doigt qui était ornée elle aussi d'une pierre de Lune.
— J’ai le temps pour ça.
— Je croyais que tu ne voulais plus te métamorphoser ?
— Je… ça ira, ne t’en fais pas.
Harvey s’approcha d’Ashley et la serra dans ses bras :
— Alors comme ça, ma petite fille est amoureuse…
— P’pa ! J’ai vingt-trois ans… Il va falloir t’y faire.
— Jamais, murmura-t-il en déposant un baiser sur sa tête.
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Ashley Winston |
Broadway, Lundi 18h00Avec les derniers événements, Ashley avait complètement oublié la mission qu’elle avait confié au faussaire. Elle fit une halte dans l’immeuble délabré du mage avant de se rendre au Majestic.
— Mademoiselle Winston. Je commençais à croire que vous aviez changé d’avis. L’ignorance peut parfois ressembler à une couette : elle est chaude et douillette, et personne n’a vraiment à cœur de la quitter.
— Vous avez trouvé ? demanda Ash sans détour.
— Le savoir est une richesse qui se paie…
— Combien ?
L’homme lui glissa un petit papier avec le montant. Ashley faillit s’étrangler. Avec la potion qu’elle avait dû acheter pour sauver Zane, c’était tout ce qu’il restait de sa dernière paie qui allait s’envoler. Elle détestait cela, mais il lui faudrait demander une avance à ses parents pour payer son prochain loyer.
Elle sortit une enveloppe de sa poche, ajusta le montant puis la tendit au mage. Celui-ci vérifia rapidement la somme avant de rendre à Ashley son dossier d’adoption. Elle retira les élastiques d’un geste fébrile et parcourut l’acte de naissance sous ses yeux.
Nom de la mère : Mei WEI.
— Une famille honorable, commenta le mage.
Ashley se leva et prit congé, incapable d’articuler le moindre son.
WEI. Elle était une WEI.Il fallait qu’elle contacte Tony.
Est-ce qu’il savait ?"
Faut qu'on se voit, c'est important. Je finis à 22h00. Désolée pour ta mère. Ash"
L’heure sur son portable la fit accélérer le pas. Elle allait être en retard au boulot, ce n’était pas le moment de se faire virer. Ashley emprunta l’allée Shubert et tourna à droite sur la 44ème rue. Le Majestic n’était plus très loin. De l’autre côté de la rue, la voix de l’espèce de prédicateur du quartier résonna :
— Certains disent que c'était un ange, brûlant de lumière le long de voies aussi hautes que le Paradis, avant que les orgueilleux ne le fassent chuter sous la terre. Soyez témoin ! Une brèche s’est ouverte. Il brûle toujours, consumé par la vengeance et s’enfonce dans les entrailles de la Terre. Il est proche de son but et vous, petites créatures ignorantes, vous fermez les yeux.
Ashley s’engouffra dans le théâtre et fut aussitôt happée par la troupe.
— Ashley ! s’exclama Betty en la serrant dans ses bras.
— Euh… moi aussi je suis contente de te voir, hésita la jeune femme.
— On s’est fait un sang d’encre ! Pourquoi tu n’as pas répondu à mes messages ?
— J’ai perdu mon portable.
— J’ai cru que tu étais parmi les victimes de l’explosion de gaz !
— Quoi ? Quelle explosion ?
— Tu n’es pas au courant ? Ils en parlent non stop depuis hier soir ! s’étonna Betty en lui tendant le dernier numéro du Times. Time Square a été rayé de la carte.
Ashley lut l’article avec attention. Time Square. Là où était morte la femme de Z, là où Veronika traînait… Elle pensa appeler sa mère pour avoir l’autre version de l’histoire avant de se rappeler qu’elle était toujours introuvable.
Elle s’empara de son portable et envoya un message à Zane :
“
Tu as vu les infos ? Une explosion de gaz ou un rituel magique ?”
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Ashley Winston | Tony Wei | Zang Wei |
Chinatown, lundi 22h00Ashley roulait un peu trop vite, même pour l’heure tardive. À ses côtés, Tony restait silencieux. L’annonce de leur lien de parenté possible l’avait abasourdi.
— Je suis désolée pour ta mère. Tu as pu la voir ? lui demanda-t-elle pour briser le silence.
— Non, blackout complet. Ton père ne répond pas à mes appels.
La réponse fut laconique, presque détachée de la situation. Tony se contenta de regarder à l’extérieur, son regard passait de lampadaire en lampadaire.
— Oh merde, soupira-t-elle. Je suis désolée, il est un peu… perturbé, depuis la disparition de ma mère. Il aurait dû te prévenir. Lui et Conor l’ont emmenée chez une de ses connaissances. Un médecin qui ne pose pas de question et qui s’y connaît niveau non-humain. Elle a respiré beaucoup d’aconite, ils n’auraient pas su comment la soigner correctement à l’hôpital. Ce mec lui a sauvé la vie, Tony. Mon père est resté à son chevet jusqu’à ce qu’il soit sûr qu’elle s’en sorte…
— Merci Ashley. C’est bien que ma mère soit vivante.
Un silence plane dans la voiture, puis Tony semble se rappeler de quelque chose.
— Ah oui, et pour ta mère, je suis désolé. Mais ne t’inquiète pas ils vont tous payer. Tous ceux qui nous attaquent… oui ils vont payer et l’addition sera lourde.
Les dernières phrases furent prononcées avec plus de force dans la voix de Tony, et ses yeux semblaient plus brillant.
— Ne vas pas faire de bêtise, tu es flic, je te rappelle…
Ashley gara la voiture. Ils étaient arrivés à destination.
Le portail d’entrée était en bois travaillé avec soin, une gravure en son centre représentait le Yin et le Yang. Ashley pensa au tatouage qui entourait son nombril. Les murs de la propriété, d’une hauteur de deux mètres, étaient fait de pierre et surmontés de tuiles.
Tony ouvrit le portail qui n’était pas verrouillé, un chemin de pierres blanches menait à plusieurs bâtiments au sein de la propriété. L’un d’eux était une maison en bois de deux étages, l’autre, un bâtiment de plain-pied. Le reste de la propriété était constitué d’un jardin visiblement entretenu avec soin et d’un petit étang d’où on entend croasser. S’il n’y avait pas eu l’agitation de la ville, on aurait pu se croire dans un village de campagne.
Il ne semblait pas y avoir d'électricité dans la propriété. Un jeune garçon noir en kimono approcha à leur rencontre, un lampion à la main pour seule source d’éclairage.
— Bonsoir Tyron, finalement tu as emménagé ?
— M. WEI, c’est un plaisir de vous revoir. Maître WEI attend votre amie, malheureusement vous ne pouvez pas l’accompagner.
— Je sais Tyron, je sais. Ashley tu es arrivée et Oncle Zang t’attend. Je reste ici.
Ashley lança un regard surpris à Tony, puis se décida à suivre le jeune garçon.
— Il travaille dans quoi ton Maître au juste ? demanda-t-elle en admirant la propriété.
— Maître WEI est un artiste martial de renommée internationale. Et en-dehors de cela je ne saurais vous dire si il travaille, enfin au sens où nous l’entendons. Tout le monde vient le voir avec des problèmes et lui il se contente de les écouter.
— Je devrais peut-être changer de branche, marmonna-t-elle.
Tyron la conduisit à l’intérieur de la maison, dans un superbe salon.
— Attendez ici. Mon Maître ne devrait pas tarder.
Il s’éclipsa. Maître Zang arriva quelques minutes après. Il portait un plateau avec le nécessaire pour faire du thé.
— Bonsoir, Mme Winston. Je suis ravi de cette rencontre. J’ai entendu le plus grand bien de vous et du don qui est le vôtre. Est-ce que vous accepteriez de partager une tisane avec moi ?
Maître Zang s’installa en face d’Ashley et commença à servir deux tasses.
— Merci de me recevoir à cette heure tardive. Je suppose que Tony vous a expliqué la raison de ma visite ?
— Droit au but, telle la flèche. Malheureusement, non, Tony ne m’a rien dit ou plus exactement je lui ai demandé de se taire. La fille d’Harvey Winston est, et sera toujours la bienvenue dans ma maison. Expliquez-moi ce qui me vaut le plaisir de votre compagnie, Madame Winston ?
Ashley fouilla dans son sac à main et sortit son acte de naissance. Elle tendit la feuille à Maître Zang :
— J’espère que vous pourrez m’aider à éclaircir quelques éléments de mon passé, de notre passé commun, si j’en crois le nom inscrit ici.
Maître Zang prit le temps de lire le document, à plusieurs reprises, puis il le redonna à Ashley. Il semblait rassembler ses pensées et but lentement une gorgée de sa tisane. Une forte odeur de jasmin envahit la pièce au fur et à mesure que les fleurs infusaient.
Ashley rajusta sa position sur le fauteuil. Elle voulait des réponses et l’homme en face d’elle gardait obstinément le silence.
— J’ai dû payer cher pour obtenir ce papier, ou plutôt ce nom. Dans le dossier d’adoption signé par mes parents, elle n’était mentionnée que sous son nom d’épouse, ce qui n’est pas la norme dans ce genre de procédure. Pourquoi tant de mystère autour d’elle ?
— Madame Winston, vous vous engagez sur un chemin périlleux. Actuellement vous avez une mère et un père en la personne de Penny et Harvey Winston. Êtes-vous si cupide que d’en vouloir deux autres ?
— Cupide ? Vouloir connaître ses racines, c’est être cupide ? Vous vous foutez de moi ?
Maître Zang, ne réagit pas à l’emportement de la jeune femme. Il se contenta de la regarder et il pose lentement sa tasse sur la table.
— Pourquoi ont-ils été tués ? demanda-t-elle en se forçant à maîtriser la colère dans sa voix.
— Madame Winston, je vous prie de bien vouloir excuser les paroles malheureuses du vieux chinois sénile que je suis.
— Mon père a votre âge et n’aimerait pas se faire traiter de vieux sénile, l’interrompit-elle.
Maître Zang sourit.
— Votre père a donc 98 ans. Il me semble pourtant avoir fêtés ses cinquante années il y a peu de temps. Mais laissons ces comptes d’apothicaire de côté. Et revenons en au but de votre visite. Je respecte la voie sur laquelle vous vous engagez, mais avez-vous prit le temps de réfléchir aux conséquences ? Que vont ressentir Penny et Harvey ? Ne vous ont-ils pas élevés, protégés, éduqués ? Si vraiment vous le souhaitez je peux vous en dire plus, mais craignez le dragon derrière la porte.
— Ne vous inquiétez pas pour mes parents. Mon adoption n’a jamais été un tabou. En revanche, la raison de la mort de mes parents biologiques et le nom de ma mère m’ont été cachés jusqu’à il y a peu. Je n’ai pas besoin de vos conseils, Maître Zang, j’ai besoin de réponses.
Elle fixait le vieil homme, son corps entier trahissait son impatience.
— Très bien, il en sera comme vous le souhaitez. Mei Wei est ma petite fille et donc tu es mon arrière petite fille. Elle est morte par ma faute. Je n’ai pas su la protéger. Mes ennemis sont nombreux et pour me faire souffrir, ils s’en prennent aux miens. Ton père, un homme bien, qui ne voulait que le bonheur de ta mère, pensait qu’en se mariant en secret cela leur permettrait de vivre leur bonheur. Malheureusement, ils ont été tués. Et crois bien, ma jeune enfant, que je pleure chaque jour cette perte.
— Pourquoi m’avoir abandonnée ?
— Oui, effectivement, c’est ce que j’ai fait, ma jeune enfant. Cette décision me déchire le cœur depuis lors. Mais comment te protéger de mes ennemis ? Je t’ai confiée aux personnes les plus sûres que je connaisse. C’est la seule solution que j’ai trouvée à l’époque. Mais depuis, il ne s’est pas passé un jour sans que je prenne de tes nouvelles.
Il se leva et se dirigea vers un meuble bas laqué d’où il sortit un classeur. Celui-ci était rempli de photos d'Ashley depuis son plus jeune âge. Les fêtes d’anniversaire, Noëls, les spectacles d’école, ses vacances etc… Et des photos de certains dessins d’Ashley. Il y avait aussi une photo d’un bébé, entouré d’une jeune femme sur un lit et d’un homme costaud à son chevet. Maître Zang lui tendit la photo, sa main tremblant légèrement.
La jeune femme s’en saisit et reconnu son père biologique. Elle observa longtemps les traits de celle qu’elle devinait être sa mère. Harvey et Penny lui avaient dit ne pas avoir de photo d’elle.
Sa main tremblait et des larmes se mirent à couler sur ses joues. Elle les chassa d’un geste rageur :
— Ils savaient, depuis tout ce temps ?
Maître Zang comprit qu’elle parlait de Harvey et Penny.
— C’est dur Ashley, je sais que cela est difficile pour toi. Mais ils ont fait un pacte pour te protéger. Ils ne savaient pas toute l’histoire, mais tes parents, et particulièrement ta mère, sont très intelligents. Je ne sais pas exactement ce que Penny Winston a découvert, mais elle n’a jamais cessé de chercher la vérité. Jusqu'à ce jour, mes amis ont toujours protégé ce secret et je pense qu’elle était proche de connaître toute l’histoire.
— Et vous ? Vous avez découvert qui a tué votre petite-fille à l’époque ?
— Cela n’a jamais été un secret, Ashley. J’ai toujours su qui avait tué ton père et ta mère. Je suis celui qui les a découvert. Malheureusement, je suis arrivé trop tard et je n’ai pu que te sauver toi des flammes de votre maison. Ces flammes n’étaient pas naturelles, elles avaient été crachées par un puissant démon, l’un des 108 Dragons.
Il ouvrit le haut de sa tunique. L’intégralité de son corps était brûlé, ainsi que ses avants bras.
— J’ai fait le choix de t’arracher des flammes et de te protéger. Une fois ce choix fait, j’ai dû vivre avec.
— Et ce Dragon, qu’est-il devenu ? Vous l’avez tué ?
— On ne tue pas un Dragon, Ashley. On le tient à l’écart. Vivre dans la vengeance revient à s’empoisonner soi-même et les siens. J’ai choisi la voie de la vie et de l’équilibre. Pas celle de la vengeance et de la mort.
— Et vous ne vous êtes pas dit que ce Dragon pouvait être derrière tout ce qu’il se passe en ce moment ?
— Tout est possible mon enfant, mais je ne détiens pas la vérité. Le Dragon responsable de la mort de tes parents et de ma petite-fille n’est autre que Dame CHO. Et actuellement, elle récolte ce qu’elle a semé. Cela fait longtemps que je suis assis au bord de la rivière et bientôt je verrai son cadavre passer devant moi, une fois que ses ennemis l’auront abattue.
La jeune femme désigna la photo qu’elle avait toujours en main :
— Je peux la garder ?
Maître Zang accepta volontiers.
— Merci, pour ça, et pour le reste.
Elle prit congé et retrouva Tony qui l’attendait à l’extérieur. Le trajet du retour se fit en silence, chacun perdu dans ses pensées.