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Alors que les soupçons de collusion entre les barons des cartels et l'administration du Président Ernesto Samper se renforcent un peu plus chaque jour, ce dernier, en voyage officiel aux Etats-Unis, a réaffirmé sa détermination à lutter contre les trafiquants de stupéfiants. Il a par ailleurs demandé à son homologue, le Président Clinton, "toute l'aide nécessaire" pour mener à bien cette entreprise. Si les USA se sont ouvertement positionnés en faveur d'une coopération internationale pour éradiquer ce fléau, Washington reste néanmoins sceptique sur la volonté réelle des colombiens à combattre une "économie souterraine, certes illégale, mais néanmoins lucrative". Ainsi, par l'intermédiaire, de son porte parole, la Maison Blanche a fait savoir qu'elle attendait avant tout des résultats probants avant d'envisager de débloquer une aide financière."
Colombie, années 90: le pouvoir, entre les mains du Président Ernesto Samper, n'a jamais paru aussi fragile; le chef de l'état, et avec lui toute la classe politique du pays, est soupçonné d'avoir des accointances avec les narcotrafiquants. Ces derniers, solidement installés dans l'arrière pays, prospèrent. De leur côté, affranchis de la tutelle du Parti Communiste Colombien, les FARCs semblent plus puissants et plus incontrôlables que jamais. A l'opposé sur l'échiquier politique, les milices d'extrême droite, favorables à un gouvernement fort, commencent à se rassembler sous la bannière de l'AUC (Autodefensas Unidas de Colombia); leur financement reste néanmoins opaque...
Ainsi, alors qu'elle se renforce dans les provinces du nord, l'AUC se fait connaitre par de multiples extorsions pour financer ses activités; le gouvernement, complaisant, laisse faire... et entame une vaste opération anti drogue dans les faubourgs de Cali. La police et l'armée sont déployée en nombre dans cette ville occupée par les trafiquants; les premiers réseaux et labos sont découverts ! Les cartels réunissent alors leurs hommes et s'arment pour protéger leurs intérêts. De leur côté, les FARCs renforcent leur réseau dans les provinces qui leur sont traditionnellement acquises, notamment dans les montagnes au sud du pays. Profitant d'un terrain favorable et qu'ils connaissent bien, ils tendent une embuscade aux milices AUC qui tentent de s'implanter dans la région; si l'affrontement fait peu de dégâts, il montre que les "rouges" ne céderont pas facilement la région de Huila-Tolima.
Se sentant menacé, le cartel de Cali profite de son
industrie bien huilée pour engranger les juteux profits de son petit commerce... juste à temps ! Le Président Samper donne son feu vert à une vaste opération conjointe de la police et de l'armée à Cali. Malgré quelques échanges de tir avec les hommes de main des narcotrafiquants, la ville est rapidement sous contrôle gouvernemental; les labos sont démantelés, les têtes de réseau sont arrêtées et une quantité importante de cocaïne est saisie. Malheureusement, les "pontes" du cartel ont plié bagage. Ainsi, même si dans les hautes sphères de l'état on se félicite de ce succès, l'opinion n'est pas dupe !

De leur côté, FARCs et AUC multiplient les extorsions afin d'accroitre le nombre de leurs partisans et les armer. La situation à Huila-Tolima devient explosive, bien qu'aucun affrontement n'ait lieu. Quant aux cartels, nullement déstabilisé par la perte de leur fief de Cali, ils se renforcent et continuent de produire de la drogue. Mieux encore (ou pire, selon les points de vue), ils s'exportent et installent des bases au Panama. Leurs affaires n'ont jamais paru en aussi bonne forme !
Fort de son succès à Cali, le gouvernement semble désormais cibler la guérilla marxiste. Les "héros de Cali" (tel que la communication officielle les appellent) s'installent dans les montagnes détenues par les FARCs et y construisent une base avancée sous l'oeil bienveillant des AUC, en difficulté face à leurs ennemis communistes. Les liens entre l'administration Samper et les paramilitaires apparaissent au grand jour lorsque la Fuerza Aérea Colombiana envoie des appareils bombarder une position FARC débusquée par les AUC dans la province de Meta West; insuffisant toutefois pour en chasser les insurgés.
Les cartels colombiens s'allient aux
trafiquants mexicains et s'ouvrent de nouvelles voies vers le marché américain; Washington affiche son mécontentement ! Dans les rangs des FARCs s'élèvent un nouveau leader;
Raúl Reyes ! Seule bonne nouvelle pour le pouvoir en place, la région d'Antioquia-Bolivar affiche activement son soutien à la présidence. Elle est livrée clef en main par les AUC !
Le gouvernement profite donc de la nouvelle pour lancer une vaste campagne de
propagande. A ce stade, les positions sont figées, aucun camp ne semblant en mesure de l'emporter. Les cartels sont richissimes mais manquent de bases, les FARCs ont peu progressé et ont échoué à convertir Huila-Tolima qui est contestée. Quant aux AUC, sans doute trop pris par leur soutien actif au pouvoir, ils sont loin, très loin, d'égaler la guérilla en terme de bases. Samper échoue à un petit point de son objectif (61 de "support") et perd son mandat lors des élections présidentielles.
Le 7 août 1998, Andrés Pastrana Arango devient le 38ème président de la République de Colombie. Sitôt au pouvoir, il entame le dialogue avec les FARCs et en échange de la signature bilatérale d'un traité humanitaire, il leur cède la province d'Huila-Tolima. Le retrait des troupes gouvernementales est accueilli comme une victoire par les guérilleros; la zone devient une "FARC zone" où les militaires et policiers n'ont pas droit de cité ! Les quelques sympathisants des AUC encore présents dans la région s'inquiètent des conséquences de cette décision... et le manifestent en attaquant les nouveaux maitres des lieux.
Malheureusement pour eux, sans doute échaudé par ces combats, le Président Pastrana décide d'une DMZ et crée una
zona de convivencia: la province de Santander-Boyacà devient une autre "FARC zone" malgré les protestations du ministre de la Défense !
C'est sur cet événement, particulièrement défavorable aux autorités, que nous clôturons cette partie d'Andean Abyss faute de temps.

Hier après midi, un contact du forum Strategikon est venu m'initier à
Andean Abyss, le premier opus de la série COIN ayant pour cadre la Colombie à la fin du XXème siècle. Comme je m'y attendais, j'ai été très enthousiasmé par ce jeu que je trouve tout simplement excellent et riche de par ses mécanismes mais aussi sur l'aspect culturel / histoire (j'ai découvert tout un tas de chose sur cette période troublée en Colombie, et sur ce pays tout court).
J'ai notamment particulièrement apprécié:

Le système des tours de jeu qui oblige à faire de cruels choix: en gros, sauf exception, chaque faction ne joue qu'un tour sur deux, et à son tour, une faction a un nombre plus ou moins limité de choix. Ainsi, les options les plus "puissantes" (jouer un événement, faire une action simple et une action spéciale... laisse plus de liberté au joueur suivant pour choisir son action). De fait, on doit parfois (souvent ?) se limiter dans ses actions afin de restreindre les choix du joueur qui vient après et lui laisser ainsi moins de champ de manoeuvre.

Le système des événements: chaque tour, une carte détermine l'événement qu'il est possible de jouer, et l'on sait également quel sera l'événement suivant. Chaque événement à un effet positif pour le gouvernement et un effet positif pour les insurgés. Cela contribue encore plus à l'importance du choix de son action. Je m'explique: si deux événements favorables à mon camp vont s'enchainer, que fais je faire ? Je sais que je ne pourrai en activer qu'un des deux (je joue un tour sur deux), donc lequel des deux vais je privilégier ? Est ce que je vais passer mon tour et prendre le deuxième événement ? Mais ce faisant je laisse l'opportunité au camp adverse de jouer le premier événement qui va le renforcer ? Est ce que je restreint mes actions (jouer une "limited operation") pour que le joueur derrière moi ne puisse pas jouer l'événement ? Est ce que je joue un événement "rebelle" qui m'intéresse faiblement juste pour empêcher le gouvernement de bénéficier de l'effet de l'autre événement qui est extrêmement avantageux ? Bref, les cas de conscience sont nombreux et aucun choix n'est anodin. On ne peut avancer sur tous les fronts !

L'asymétrie des factions: chaque faction a ses propres objectifs et ses propres moyens d'action, assurant ainsi une grande rejouabilité (mais également une plus grande difficulté à maitriser tous les camps).
Bref, je suis plus que conquis.